Le statut unique d'Entrepreneur Individuel définitivement adopté
La loi en faveur de l’activité professionnelle indépendante a été promulguée le 14 février 2022.
Focus sur les principales mesures du texte adopté à l’unanimité en commission mixte paritaire.
La loi n° 2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante a été publiée au Journal officiel du 15 février 2022.
Ce texte vise à créer un environnement juridique, fiscal et social plus simple et protecteur pour les indépendants (artisans, commerçants, professions libérales…). Il vient compléter les mesures fiscales et sociales d’ores et déjà adoptées dans le cadre des lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2022.
Il prévoit ainsi un nouveau statut unique protecteur pour les entrepreneurs individuels et ouvre le bénéfice de l’allocation des travailleurs indépendants (ATI) lorsque leur activité n’est plus viable.
Création d’un nouveau statut pour les entrepreneurs individuels (art. 1)
L’article 1er du projet de loi indépendant créé un statut unique pour les entrepreneurs individuels, protecteur de leur patrimoine personnel. Il traite également de la transmission du patrimoine professionnel des entrepreneurs individuels. Ce statut entre en vigueur à l’expiration d’un délai de 3 mois à compter de la date de promulgation, soit à partir du 15 mai 2022.
Le patrimoine personnel de l’entrepreneur individuel mieux protégé
Alors qu’aujourd’hui seule la résidence principale de l’entrepreneur individuel est protégée de ses créanciers professionnels, le nouveau statut d’entrepreneur individuel permettra de protéger l’ensemble du patrimoine personnel de l’indépendant. Toute personne physique exerçant une ou plusieurs activités professionnelles indépendantes, qu’elle(s) soi(en)t commerciale, artisanale, libérale, agricole, bénéficiera automatiquement de la protection de son patrimoine personnel, qui deviendra par défaut insaisissable par les créanciers professionnels.
Seuls les éléments utiles à l’activité professionnelle de l’entrepreneur individuel pourront être saisis en cas de défaillance professionnelle.
La séparation des patrimoines s’effectuera automatiquement sans démarche administrative ou information des créanciers. L’entrepreneur pourra toutefois renoncer au bénéfice de cette séparation des patrimoines professionnel et personnel en faveur d’un créancier professionnel pour un engagement spécifique, en particulier pour obtenir un crédit bancaire. La composition de chaque patrimoine devrait être précisée par un décret en Conseil d’État.
Le texte précise également les conditions dans lesquelles les procédures d’insolvabilité prévues pour les entreprises en difficulté et pour les particuliers surendettés pourront s’appliquer à l’entrepreneur individuel selon une procédure simplifiée (art. 5).
Quelques exceptions à la séparation des patrimoines
En cas de décès de l’entrepreneur individuel, si l’état de cessation des paiements est avéré à la date du décès, la procédure collective n’impactera que le patrimoine professionnel (dualité patrimoniale maintenue). À défaut, le droit commun des successions s’applique avec pour effet la réunion des deux patrimoines.
L’administration fiscale pourra saisir l’ensemble des biens de l’entrepreneur individuel pour le recouvrement de l’impôt sur le revenu, les prélèvements sociaux (sauf en cas d’option pour l’impôt sur les sociétés) et la taxe foncière. En revanche, les dettes dont l’entrepreneur individuel est redevable auprès des organismes de recouvrement des cotisations et contributions sociales ne relèveraient que du patrimoine professionnel.
La transmission de l’entreprise individuelle facilitée
L’article 1er du projet de loi indépendant facilite la transmission de l’entreprise individuelle et son passage en société en vue de faire évoluer l’activité.
Il prévoit ainsi que l’entrepreneur individuel peut vendre, donner ou apporter en société l’intégralité ou une partie seulement de son patrimoine professionnel, sans procéder à la liquidation de celui-ci. Il est précisé, en effet, que, l’entrepreneur individuel peut ne transférer que certains des éléments de son patrimoine professionnel pris isolément, dans les conditions du droit commun ou droit spécial prévues pour les éléments objets du transfert.
En l’absence de cette précision, la mesure aurait pu poser problèmes lorsqu’un entrepreneur individuel exerce deux activités – comme par exemple comme charpentier et comme paysagiste – et qu’il souhaite apporter seule l’une des deux de ces sociétés.
L’article 2 du même texte prévoit la transmission de tous les droits et obligations découlant du bail commercial au bénéficiaire du transfert de patrimoine professionnel.
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Le statut d’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL) supprimé (art. 6)
Ses principaux avantages étant repris dans le nouveau statut d’entrepreneur individuel, le statut d’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL), institué par une loi du 15 juin 2010, cessera progressivement de s’appliquer. Ce statut jugé complexe n’a pas rencontré un grand succès (moins de 100 000 EIRL en juin 2021).
Aucune nouvelle EIRL ne pourra être créée, après la promulgation de la loi, soit après le 15 février. Pour les entreprises déjà créées avant la réforme, le régime de l’EIRL continue toutefois à s’appliquer. En revanche, la dissociation des patrimoines ne s’appliquera qu’aux nouvelles créances. Ainsi :
- si le bénéficiaire de la cession du patrimoine affecté est un entrepreneur individuel, autrement dit une personne physique qui exerce déjà une activité professionnelle indépendante en nom propre, l’affectation n’est pas maintenue (car le bénéficiaire ne peut plus opter pour le régime de l’EIRL). En effet, à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, nul ne peut affecter à son activité professionnelle un patrimoine séparé de son patrimoine personnel en application du régime de l’EIRL.
- en revanche, si le bénéficiaire de la cession du patrimoine affecté est une personne physique qui n’exerce pas d’activité professionnelle indépendante en nom propre, l’affectation est maintenue, car le bénéficiaire devient alors entrepreneur individuel sous le régime de l’EIRL à la place du cédant.
Cela n’augmente pas le nombre de patrimoines affectés en EIRL qui demeurera constant. Il en est de même en cas de cession au profit d’un autre EIRL.
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Les conditions d’accès à l’allocation travailleurs indépendants (ATI) assouplies (art. 11)
Créé par la loi « avenir professionnel » de 2018, l’assurance chômage des indépendants – ou allocation des travailleurs indépendants (ATI) – permet depuis le 1er novembre 2019, aux travailleurs non salariés dont l’activité a cessé de bénéficier d’une allocation de 800 € par mois pendant 6 mois, sous réserve d’avoir exercé cette activité en continu pendant 2 ans, qu’elle ait cessé pour liquidation ou redressement judiciaire, d’avoir généré 10 000 € de revenus par an en moyenne et de disposer, à titre personnel, de ressources inférieures au montant du RSA. Cinq ans après sa mise en œuvre, le nombre de bénéficiaires réels de l’ATI serait 40 fois inférieur à l’estimation de bénéficiaires potentiels identifiés.
Face à ce bilan et afin d’encourager le rebond professionnel des travailleurs indépendants, l’article 11 du texte élargit les conditions d’accès à l’ATI aux entrepreneurs qui arrêtent définitivement leur activité devenue non viable (cessation définitive et totale d’activité déclarée auprès du CFE ou de l’Inpi). L’ATI, reste fixée à 800 € par mois maximum et un montant plancher sera fixé par décret à 600 euros mensuels.
La condition d’un revenu minimum à 10 000 € est maintenue uniquement pour la meilleure des deux années précédant la demande d’ATI. Cette mesure permet d’assurer une équité en permettant que le montant de l’ATI ne dépasse pas proportionnellement le montant d’autres allocations intervenant en cas de perte d’emploi, tout en garantissant un montant minimal.
Une période de cinq ans incompressibles doit être respectée entre la cessation du bénéfice de l’ATI et la restauration de ce bénéfice.
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Le traitement des dettes professionnelles des gérants majoritaires de SARL facilité en cas de défaillance (art. 10)
Afin de sécuriser la situation des gérants de SARL, le projet de loi rend désormais possible l’effacement des dettes professionnelles dans le cadre d’une procédure de surendettement des particuliers.
Il permet ainsi que les dettes professionnelles d’une personne soient prises en compte, en même temps que ses autres dettes, pour l’appréciation de sa situation de surendettement ouvrant droit à l’ouverture d’une procédure de traitement du surendettement des particuliers.
Autres mesures
- Les conséquences du nouveau statut de l’entrepreneur individuel sont tirées aux regard des procédures civiles d’exécution (art. L. 161-1 du code des procédures civiles d’exécution) (art. 3) et des procédures de recouvrement des créances fiscales et sociales (art. L. 273 B du livre des procédures fiscales et art. L. 133-4-7 du code de la sécurité sociale) (art. 4)
- Le dispositif d’unification du recouvrement des cotisations et contributions formation professionnelle et apprentissage qui a été opéré au profit des caisses de mutualité sociale agricole (MSA) est complété. L’accès à la formation des indépendants facilité. Le fonds d’assurance formation des chefs d’entreprise artisanale (FAFCEA) et les conseils de la formation des chambres de métier et de l’artisanat (CMAR) seront fusionnés au 1er septembre 2022. Un régime transitoire a été introduit par les parlementaires entre la publication de la loi et le 31 août 2022 (art. 12)
- Les personnes exerçant l’activité de toilettage des chiens, chats et autres animaux de compagnie relèvent de l’artisanat (art. 16 de la loi n° 96-603 du 5 juillet relative au développement et à la promotion du commerce et de l’artisanat) (art. 9)
- La procédure disciplinaire des experts-comptables est adaptée (art. 13)
- Le conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables change de nom et devient le conseil national de l’Ordre des experts-comptables (art. 15)
- Le cadre de la négociation collective pour les chambres de commerce et d’industrie (CCI) est revu (art. 16 et s.)
- Le gouvernement est enfin habilité à prendre des ordonnances pour :
- simplifier et clarifier les règles communes applicables aux professions libérales réglementées (art. 7)
- rénover le code de l’artisanat (art. 8)
📰 Source : NetPME